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Éduquer son chien avec des friandises

Dernière mise à jour : 17 juin 2024

Ici et là, j’ai lu et entendu beaucoup de critiques négatives contre la friandise. Je vous donne ici mon point de vue.


“Ça ne marche pas”

À quel moment la donnez-vous ? Alors qu’il est en train de ruer dans les brancards quelqu’un qui le stress (un autre chien, un monsieur avec une casquette) ?

En quelle quantité ? La friandise en question est-elle suffisamment motivante ? Si vous lui distribuez à tout-va, votre friandise, ainsi que le fait de lui en donner, vont perdre de la valeur car ils n’apparaîtront pas au moment adéquat.

Quand en donner ? Personnellement, j’en donne : en entraînement d’un comportement particulier, j’en donne après avoir marqué (c’est-à-dire signalé au chien que ce qu’il vient de faire me convient) en guise de récompense ; en modification émotionnelle d’un stimulus désagréable (en simplifiant, la friandise arrive pour changer la vision qu’a le chien).

Comment la donner ? Cela vous paraît évident ? Vous allez me répondre à la main ? Eh bien, en fait, c’est plus complexe. Il m’est arrivé, pour des chiens qui ne me connaissaient pas, et ne voyaient pas d’un bon oeil qu’une inconnue s’intéresse à eux (donc avaient tendance à charger ou s’enfuir), de me baisser, de lancer délicatement des friandises au sol près d’eux. Mon but : que chacun de mes mouvements soit synonyme de l’arrivée d’un élément agréable. Ma voix : à ce moment-là, elle n’avait aucune valeur à leurs yeux. Une caresse : avec certains chiens, c’est un moyen de se faire mordre, et ça ne fait pas partie de mes objectifs à la première rencontre (ni aux suivantes d’ailleurs !). L’ignorer totalement ? Lui ne m’ignore pas, ni ma présence à son domicile, ni le fait que je m’adresse à ses humains ; et c’est un choix que j’ai fait de communiquer aussi avec l’animal-chien. La friandise me sert alors à briser la glace, à donner au chien une première bonne impression de ma personne (s’il a été peu ou pas socialisé, s’il a eu des expériences négatives, sa perception de mon langage corporel peut en être affectée).


“Je veux qu’il m’obéisse pour moi”

Devenez une friandise ! Pour ça, il vous faudra avoir une relation dont la valeur sera aussi forte voire plus que le stimulus qui le provoque. N’oubliez pas que certaines actions sont auto-renforçantes pour le chien, ce qui signifie que quelle que soit votre relation, elles se reproduiront car en elles-mêmes elles lui procurent ce qu’il recherche. Par ailleurs, quand il accomplit un comportement que vous désirez, le fait-il pour vous ou pour éviter une part de vous qu’il a vue un jour (même si elle ne lui était pas adressée) ?


“Il va grossir”

"Donc, ce que tu me dis, c'est que tu as toute une boîte de friandises, mais je n'en ai qu'une ?"

Quelle taille ont vos friandises ? Quelle est leur valeur nutritionnelle ? Les déduisez-vous de sa portion journalière ? Lui en donnez-vous à outrance ? Que vous utilisiez des tubes de pâté ou de crème, ou un aliment solide, vous prenez la taille de l’ongle de votre auriculaire et divisez encore en deux. Si elles sont trop grosses, votre chien sera passé à autre chose le temps de mâchouiller et avaler ; vous aurez besoin de le recentrer sur vous.

Un gros poulet bien rôti ? Un fromage qui pue à s’arracher les narines ? Un maquereau séché ? Du beurre de cacahuètes sur un cou de canard ? Quand je parle de “friandise”, il s’agit bien de nourriture.

Mon travail ne consiste pas à faire grossir le foie des chiens pour les fêtes de fin d’année, ni à ce qu’ils grossissent juste pour inciter leurs propriétaires à venir en promenades. Cela peut être n’importe quel aliment digeste auquel votre chien n’est pas allergique et qu’il affectionne. En effet, pour que l’effet escompté apparaisse, lui seul détermine ce qui lui plaît, ni vous, ni moi, ni aucun autre être.


“Mon chien est trop excité quand il y a de la nourriture”

L’est-il aussi quand il y a un autre stimulus (jouet, chien, chat, vélo) ? Donc, le comportement n’est pas provoqué par la friandise mais par son manque de gestion de ses émotions. Si c’est le type de nourriture qu’il l’excite, par rapport à ce que vous lui demandez, celle-ci a peut-être une valeur trop élevée. Inversement, si sa valeur est basse par rapport à son effort, il montrera de la démotivation ou sera vite distrait.La nourriture aurait-elle une valeur si forte qu’il accomplirait une action malgré lui ? Dans ce cas, elle n’est pas distribuée avec bienveillance car elle ne tient pas compte de ce qu’il exprime.


“Je veux utiliser d’autres récompenses”

Alors là, vous n’avez que l’embarras du choix ! Jouet, jeu, reprise de la balade, aller voir un copain chien ou humain, une caresse, des paroles, une activité plaisante.

Mais quelle valeur ont-elles ? Pas pour vous, pas pour ce que vous pensez qu’elles sont, mais pour votre chien ? Et ce, dans chacun des contextes dans lequel il est mis.

Si vous utilisez un autre outil que la friandise, mais renforcez un comportement, le principe est juste le même (à condition qu’il ait le même effet) !


“Ce n’est que du leurre”

Pour commencer, je ne suis pas friande de ce terme dans le contexte de cettte phrase, avec le sous-entendu qu'il implique : que l’intention de l’humain est de tromper le chien. Or, j’ai vu maints chiens finirent par “éduquer” leurs humains car ils avaient compris qu’un geste appelait une friandise s’ils avaient accompli une certaine action juste avant. Si vous faites du rappel avec les friandises à la main, je n’appelle même plus ça du rappel ; s’il entend le sachet ou voit votre bras bouger, vous venez de lui dire “friandise” alors qu’il n’est peut-être même pas encore revenu. Par contre, en medical training, je n’hésite pas un instant à indiquer au chien quelle position prendre avec l’aide d’une friandise. Là, je préfère parler de “guide alimentaire”.

Le timing, le moment où vous donnez votre friandise, va faire toute la différence entre savoir si ce que vous avez en main, ce même petit bout de jambon, est-il : un leurre, une récompense, un élément associatif ? Est-ce votre friandise qui va transformer la perception du stimulus ou le stimulus aversif qui va infecter la perception de votre friandise ?

Par ailleurs, la friandise fonctionne telle une jauge de l’état émotionnel du chien. Si celui-ci a des signaux très subtils ou qui sont altérés par certains stimulii agréables, la façon qu’il aura ou de refuser ou de prendre la friandise indiquera en partie son niveau de stress négatif vis-à-vis du stimulus aversif.

En elle-même, étant un besoin élémentaire (se nourrir), elle ne requiert aucun apprentissage pour être appréciée (j’évoque là le fait de s’alimenter, pas le goût lui-même).

La friandise n’est donc pas que du leurre, ni que du renforçateur. Et tout leurre ou renforçateur n’est pas une friandise.


“On ne peut pas s’en débarrasser, je vais toujours devoir en avoir sur moi”

Plusieurs raisons sont souvent sous-jacentes à cette réflexion. D’un côté, il se peut que le chien n’ait en fait pas encore acquis le comportement et ait besoin de plus de temps d’apprentissage ; ce qui explique que vous ne passiez pas encore dans la phase de diminution ou d’alternance avec d’autres types de renforçateur. Soit vous partez du principe que vous “payez” votre chien à chaque action qui vous convient, soit vous le faites aléatoirement, soit vous diminuez jusqu’à ne plus distribuer de friandises. Si vous optez pour la dernière, j’espère juste que vous avez prévu de transférer la valeur de la friandise sur autre chose. Une fois, j’ai conseillé à un client d’utiliser sa petite-amie comme friandise… Oops ! Heureusement, il avait compris où je voulais en venir : il était question qu’au vu de sa valeur pour le chien, sa présence et sa voix remplacent les friandises alimentaires. Mais si vous ôtez toute motivation, quelle qu’elle soit, vous risquez aussi d’ôter au chien la raison d’exister d’un comportement.


“C’est sous-estimer les capacités du chien”

À faire quoi ? Quand je les utilise parce qu’un chien est en mode “je-vais-bouffer-l’individu-face-à-moi” (chien ou humain), je ne me pose pas ce genre de question parce que j’observe un animal qui est sous le joug de ses propres émotions. Il n’évalue alors plus son environnement que par le biais de celles-ci. Or, il est possible qu’elles résultent d’expériences passées négatives ou d’un manque de socialisation ou d’autres raisons… Je suis la première à parler d’anticipation, cependant dans la vie réelle personne n’est en mesure de contrôler l’ensemble de ce qui arrive. La friandise me sert alors à accompagner le chien dans son apprentissage ; la diminuer et varier le type de récompense ou d’association agréable que le chien reçoit me montre que l’apprentissage devient plus ancré.


“Vous êtes juste un distributeur de bonbons en fait”

CandyMachine

Pour obtenir un résultat convenable avec une friandise, de quoi aurez-vous besoin ? D’un chien, de friandises alimentaires, de valeur et taille appropriées (ni trop grosses ni trop petites, ni sans aucun intérêt gustatif ni trop attirantes), d’un plan d’entraînement réfléchi et raisonné, d’observation de l’environnement, de son analyse, d’anticipation, de précision dans votre langage corporel et vos mouvements.

Si vous distribuez à tout-va, votre chien est-il en apprentissage ? Est-ce une action soutenue ? Est-ce un environnement intense émotionnellement ? Si vous ne lui accordez aucune pause entre chaque prise de nourriture, il n’a pas le temps de prendre d’informations et n’apprend alors plus rien. Vous êtes dans le contrôle de votre chien. Êtes-vous dans les prémices d’un travail ? Si vous n’avez pas diminué et souhaitez le faire, quel apprentissage n’est pas acquis pour que vous y parveniez ? Si vous êtes en travail d’association pour changer la perception émotionnelle, êtes-vous trop près ? Observez la façon dont votre chien prend les friandises ; reprenez de la distance ou reprenez le travail à un autre moment.

Donc, distribuer une friandise se fait sans réflexions ? Sans observation ? Juste parce que le chien appuie sur le bouton “bon toutou” ?


“Le chien est un animal social”

Donc il se passe de friandises ? De motivation ? Qu’on m’explique d’abord ce que “comportement naturel” signifie chez un animal domestiqué, génétiquement modifié par l’humain, sélectionné en fonction de certains traits…

Par ailleurs, cela signifie que la friandise n’est perçue que comme un élément alimentaire gustatif basique.

Un animal social vit en groupe. En l’occurence, les chiens de compagnie vivent essentiellement dans un groupe composé d’humains. Les membres de ce groupe suivent une organisation qui établit des rapports entre eux. Certains des éléments de cette organisation sont la motivation, l’aversion, le plaisir, le rejet. La friandise n’aurait toujours pas sa place ?


La friandise est un outil qui a prouvé son efficacité dans maints contextes et de façon non négligeable.

Apprenez à l’administrer et constatez pour vous faire une idée ! Comprenez-en l’utilisation en entraînement… Et régalez-vous avec ce délicieux outil de travail !

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