Je travaille la plupart du temps avec des chiens sensibilisés, soit par manque de socialisation (ou une socialisation inappropriée), soit suite à des expériences négatives parfois traumatisantes, soit à cause de prédispositions génétiques.
Certaines situations, comme un chien qui arrive à vive allure ou un humain qui les fixe, peuvent déclencher des réactions diverses : s’enfuir, être tétanisé, attaquer pour maintenir l’autre à distance ou l’éloigner. Ces réactions peuvent apparaître à quelques mètres comme à plusieurs trentaines.
Quand vous partagez votre quotidien avec un chien qui perçoit le monde telle une menace constante à affronter, vous aménagez vos sorties, vos relations sociales et familiales. Vous êtes aux aguets à l’extérieur, partagé entre le bien-être de votre chien et l’évitement d’un incident. Vous gardez à l’esprit que ce n’est pas un plaisir pour votre chien de se comporter ainsi, qu’il reste votre toutou adoré, même si ces situations sont épuisantes à vivre. Vous faites de votre mieux pour gérer l’incontrôlable. Vous faites de votre mieux pour que personne ne soit gêné. Vous faites de votre mieux pour que vos propres émotions n’influencent pas négativement vos comportements et/ou ne contaminent pas les informations que vous transmettez à votre chien.
Si votre chien a vécu une expérience telle que l’attaque d’un autre chien, et, que vous étiez présent(e), il est important que vous gardiez à l’esprit que les témoins d’une agression peuvent tout autant être choqués et traumatisés ; là, il s’agit en plus d’un être auquel vous êtes attaché(e).
Quel que soit l’élément déclencheur de votre chien, vous êtes souvent à prévenir les autres humains, à leur demander un instant pour vous ajuster, à ce qu’il garde leur propre chien près d’eux, à les contourner.
Là, vous faites face à au moins deux types de profil :
les compréhensifs
Même s’ils sont maladroits, ils seront à votre écoute, auront de bonnes intentions. Je les appelle aussi ceux-qui-font-garder-espoir. Ils vous allègent de ce moment en adaptant aussi leur propre comportement. J’en ai même vu connaître et respecter l’étiquette des croisements (un chien est en laisse, on rattache le sien ou le garde près de soi) avant que quoi que ce soit leur soit demandé. Ils se montrent solidaires, relativisant ce qui se passe, le dédramatisant pour vous involontairement.
les biiip
Eux sont volontairement dans le jugement et le mépris. Ils vous donnent des conseils non sollicités, qui s’avèrent la plupart du temps juste à démontrer leur méconnaissance de l’espèce chien et leur ignorance de votre situation. Ils dédramatisent l’approche d’eux-même ou de leur chien avec des raisons fallacieuses et une condescendance qui vous amène à boire le calice jusqu’à la lie pour éviter un énervement qui aggraverait la situation. Ils vous culpabilisent, vous assènent de reproches, vous répliquent que c’est votre réaction qui est la cause de tout, n’ont que faire de vos demandes de distanciation, insultent votre chien. Jamais ils ne présenteront la moindre once de solidarité.
Au-delà de la situation elle-même, à vivre avec un chien sensible, s’adapter à une société d’humains, dont on parle pourtant le même langage à l’inverse de Toutou, peut drainer de l’énergie et de l’espoir de jours meilleurs. Lâcher prise sur l’opinion d’autrui, sur la colère face à des personnes pour qui vous n’êtes qu’un décor dérangeant, est déjà un pas vers plus de sérénité. Il y a des êtres desquels il est salutaire de cesser d’attendre quelque chose, et d’autres qui vous surprendront et redessineront un sourire sur votre coeur, reboostant votre motivation.
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